D’avance, pardon pour ce qui va suivre. Mais bon, parfois il faut dire les choses.
Voilà : le 21 juin, quand on est chanteur, c’est quand même un petit peu l’angoisse.
D’abord, il faut savoir que la semaine précédant la manifestation, il y a systématiquement trois ou quatre quotidiens de presse écrite qui veulent vous joindre pour poser la question : « Que représente pour vous la Fête de la musique ? »
La première année, on est content de répondre, on fait appel à de vieux souvenirs de bahut, on dit qu’on se rappelle avoir branché, grâce à une rallonge orange de quatre mètres de long, un ampli Peavey sur une prise de courant du Piano-bar à Bernay dans l’Eure. La deuxième année, on redit la même chose en changeant la longueur de la rallonge. La troisième année, la rallonge est bleue. La quatrième année, on est en voyage très loin, dans un pays où il n’y a malheureusement pas de réseau, genre la moitié nord de Paris, alors hélas on ne peut pas répondre à la question. Concernant le jour même du 21 juin, il y a également à dire. On passera rapidement sur les médias qui ne vous invitent jamais en temps normal mais pour qui c’est tellement important de vous avoir ce jour-là. Bon, pour être franc, il s’agit là d’un domaine où l’on n’attend pas la quatrième année pour dire qu’on est en voyage très loin.
Souvenir d’avoir participé à l’émission « Spéciale Fête de la musique » dans une grosse station de radio avec un casting ultra-cohérent : Sanseverino, Roch Voisine, Keren Ann, Lorie. Les amateurs de mixité se régalent. A signaler : Lorie était venue avec des danseurs.
Mais le pompon c’est souvent la grande du soir proposée par le service public et enregistrée en public à Versailles ou au pied de la Tour Eiffel, ou n’importe où pourvu qu’on puisse y entasser du monde. Je l’ai fait une année, je me suis pointé piano-voix, personnage de Sempé déjà minuscule avant d’avoir commencé, et pas de bol, ils avaient oublié de brancher mon micro : sifflé par 50 000 personnes en même temps. Super moment.
Alors, avec quelques amis qui avaient vécu des choses du même genre, on a décidé de jouer ensemble à la Maroquinerie, sans trop l’annoncer, les 21 juin 2004, 2005 et 2006. Chantèrent ces soirs-là Albin de la Simone, Pascal Parisot, Franck Monnet, Thierry Stremler, Jeanne Cherhal, Holden, JP Nataf, Mathieu Boogaerts, Frédérique Dastrevignes, Matthieu Chedid, Alain Chamfort, Pascal Colomb, Cali, Alexandre Tharaud, Alexandre Varlet, Barbara Carlotti. De très jolies soirées, vraiment.
Le 19 juin 2007, j’ai eu un petit garçon.
Depuis, on fait un tir groupé anniversaire-Fête de la musique à la maison.
Quand il aura huit ans, on ira au pied de la Tour Eiffel.
Quand il en aura treize, il me demandera si j’ai pas une rallonge orange de quatre mètres.
Vincent Delerm