Vincent Delerm : « on ne fait que passer dans la vie des gens »
Avec « Deauville sans Trintignant » il a écrit l'une des plus belles chansons françaises. Vincent Delerm est de retour sur la scène de l'Embarcadère ce mardi à 21 heures, avec son dernier album « 15 chansons ».
Le Journal de Saône-et-Loire.- Lors de votre dernier passage à l'Embarcadère, mieux qu'un simple tour de chant, vous aviez proposé un spectacle avec des textes de liaison dits par François Morel. Que nous réserve celui-ci ?
Vincent Delerm.- « Déjà la primeur car je vais le présenter pour la première fois en France. Le fil conducteur en sera le cinéma, l'atmosphère tournera autour des musiques de films avec des surprises. J'essaie toujours d'avoir une longueur d'avance dans ce qu'attend le spectateur afin de l'amener là où il n'aurait jamais pensé aller. »
Le JSL.- Dans « Un tacle de Patrick Viera n'est pas une truite en chocolat », vous mettez l'accent sur la tendance à l'uniformité…
V.D.- « Je veux surtout montrer que tout n'est pas équivalent. On parle beaucoup aujourd'hui de la droite et de la gauche en disant que les clivages n'ont plus lieu d'être. C'est un peu dangereux comme pensée. Je prend l'exemple de Patrick Viera qui est un défenseur au tacle appuyé, pour montrer que gauche et droite ce n'est pas pareil. En même temps, allongé sur notre lit de mort, tout revient au même niveau. On ne va pas se souvenir, simplement de notre mariage, de la naissance de nos enfants mais aussi de petits détails sans importance. « A Naples, il y a peu d'endroits pour s'asseoir » parlait de ça. Notre cerveau a beaucoup plus d'imagination que nous. »
Le JSL.-Vos textes font souvent référence au football. Est-ce que cela ne déroute pas vos inconditionnels ?
V.D.- « C'est un vieux lieu commun. En Angleterre, les écrivains n'hésitent pas à parler football dans leur roman. Ici le clivage intellectuel/sportif tend un peu à se réduire. Je ne me priverais pas de faire référence à un match de foot plutôt qu'à une pièce de théâtre. La « valeur » est la même pour moi. »
Le JSL.- Dans « 78 543 habitants » vous dîtes « je n'ai plus 15 ans ». Que vous reste-t-il de cette époque ? V.D.- « Même si je parle souvent du passé, je ne suis pas nostalgique. Je suis très content de ne plus avoir 15 ans. Je suis dans l'instant sans rien renier. Ma façon de chanter par exemple sur mon premier disque ne me convient plus aujourd'hui mais c'est comme ça que j'estimais devoir le faire à l'époque. A 15 ans, je m'étais donné une ligne de conduite. J'ai su très tôt où je voulais aller artistiquement et j'ai réussi à ne pas me trahir. »
Le JSL.- Vous reprenez sur scène « Deauville sans Trintignant » ,comment peut-on écrire à 22 ans, un tel chef d'œuvre de cruauté ?
V.D.- « J'étais obnubilé par l'âge de Truffaut quand il a fait tel ou tel film. La jeunesse est tellement fugitive qu'il fallait la marquer d'une empreinte forte. Les personnes qui me suivent depuis toujours se reconnaissent dans cette chanson ou dans Châtenay Malabry qui est de la même veine, de la même gravité. »
Le JSL.- Le name dropping est votre marque de fabrique…
V.D.- « Cela fait appel à la mémoire collective. Quand j'entends Dutronc chanter « Catherine Langet à la télévision » cela me parle. C'est très vivant.
Ecrire des chansons est une discipline très légère, on ne fait que passer dans la vie des gens, ce n'est déjà pas rien mais il faut savoir où l'on va. On n'est pas Proust ! »
Propos recueillis par Valérie Allamo Barbelivien
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je le trouve intéressant cet article
il vient de de là : http://www.lejsl.com/actu/setl/20090127.JSA0938.html